Shigenori Soejima 2010

Interview

Le 2 Août 2010 sort au Japon le premier volume d'artbook consacré à Shigenori Soejima. En plus de divers illustrations sur bien des projets, le livre contient aussi une interview réalisée en Juin de la même année dont voici la traduction française.

Cette traduction est signée Mihael. Merci de nous créditer en cas de réutilisation, même partielle.
Sommaire :
- Vous dessiniez souvent étant enfant ?
Soejima : Je crois que j'ai commencé à dessiner pendant mes premières années d'école primaire. J'aimais tellement "Doraemon" à l'époque que j'ai commencé en copiant des parties du manga, et je ne me suis jamais arrêté. Comme "Doraemon" était ma source d'inspiration, je n'arrivais qu'à le dessiner lui au début. Mais avec le temps, j'ai eu envie de dessiner des histoires originales avec Doraemon. Mais pour y arriver je devais bien sûr dessiner d'autres personnages du manga, comme Nobita. Cela voulait aussi dire que je devais dessiner les arrière-plans. C'était assez pour me motiver à m'entraîner.

- Comment avez-vous fait la transition vers le dessin d'histoires complètes ?
Soejima : C'était une progression naturelle, de la simple copie de certaines scènes au dessin de manga complet. À l'époque je me contentais d'imiter le manga "Doraemon" du mieux que je pouvais, mais aujourd'hui je crois qu'on dirait plutôt que je créais des doujinshi "Doraemon". À mesure que je m'habituais à dessiner mes propres mangas "Doraemon", l'envie de dessiner quelque chose d'original, de créer quelque chose à partir de rien, montait en moi. Dessiner de nombreuses idées différentes m'a aidé à élargir mon répertoire artistique. Vers la fin de l'école primaire, je me suis intéressé de plus près aux animés et autres mangas, ce qui a aussi ajouté encore plus de variété à mes dessins.

- Vos idées personnelles commençaient à prendre racine.
Soejima : Je crois qu'on peut dire que j'étais du genre rêveur quand j'étais petit. J'avais tendance à me perdre dans mon imagination. Ma tête était toujours remplie de pensées du genre : "Et s'il y avait un monde comme ça, avec des personnages comme ça ? Ce serait tellement cool !" Comme la plupart des éléments de mes fantaisies venaient de mon esprit, j'ai commencé à dessiner de plus en plus de créations originales.

- Si vous aimez imaginer des choses, cela veut dire que vous aimez aussi réfléchir à des concepts en détail ?
Soejima : Oui, j'aime travailler sur les détails d'un concept original. À chaque fois que je dessinais quelque chose, j'avais toujours l'image complète en tête, jusqu'au moindre détail. Quand un film ou un manga me bouleversait, je me disais : "Moi aussi, je veux créer quelque chose d'aussi génial." Dessiner juste une illustration, une simple image, n'était pas assez pour moi alors je visais le concept dans son ensemble. Tout ce que je dessinais avait une histoire, un monde et des personnages détaillés. Mon processus de dessin commençait toujours par établir les bases d'un concept solide.
- Vous vous êtes plus orienté vers le dessin de mangas au collège ?
Soejima : J'aimerais pouvoir dire que je dessinais des mangas complets à l'époque... mais la vérité, c'est que je faisais surtout du concept art. Des choses comme des portraits de personnages, accompagnés de variations d'expressions faciales me semblaient tellement cool à l'époque. Je sais que c'est la partie après le concept art qui est vraiment importante, mais je n'ai jamais vraiment donné vie à un de mes dessins conceptuels sous la forme d'un manga complet. Pour une raison qui m'échappe, j'avais tendance à être satisfait une fois le concept finalisé et je passais vite à mon idée suivante.

- Et pendant vos années de lycée ?
Soejima : C'était pratiquement la même chose qu'au collège où je passais mes journées à produire des concept arts en masse. La plus grande différence, c'est que j'ai commencé à colorier mes illustrations au lycée.

- Quel genre d'outils utilisiez-vous à l'époque ?
Soejima : J'utilisais beaucoup de gouache acrylique. À l'époque, j'avais une fascination pour les outils et le matériel artistiques, alors je me renseignais sur ce que les professionnels utilisaient et j'achetais les mêmes choses. Les planches d'illustration en papier Kent et les marqueurs Copic étaient aussi très populaires. Quand j'étais au collège, je dessinais tout le temps juste pour m'amuser. Ce n'est qu'une fois au lycée que je me suis rendu compte que je devais étudier l'art pour m'améliorer, et que j'ai commencé à prendre tout ça au sérieux.

- Quand vous parlez d'étudier l'art, vous voulez dire que vous avez suivi des cours d'art en dehors du cursus scolaire ?
Soejima : J'étais autodidacte à l'école primaire et au collège. Une fois au lycée, j'ai pris la décision réfléchie de me préparer pour une école d'art, et c'est à ce moment-là que j'ai suivi mes premiers cours officiels de dessin.

- Avant de commencer à suivre des cours d'art, y avait-il un exercice ou une méthode particulière que vous utilisiez pour vous exercer au dessin ?
Soejima : Je ne sais pas si on peut vraiment qualifier ça "d'exercice", mais... Chaque fois que je voyais un super film, ma tête se remplissait très vite de d'images originales inspirées par ce film. Pour moi, les idées qui flottaient dans mon esprit étaient cool, épiques et très claires. Malheureusement, je n'avais tout simplement pas les compétences nécessaires pour transmettre fidèlement cette vision par le biais d'un quelconque support visuel. On peut donc dire que mon petit "exercice" consistait à dessiner mon idée jusqu'à ce que l'image sur le papier commence à ressembler à celle que je voyais dans mon esprit.

- Copier des mangas était une bonne méthode d'entraînement d'après vous ?
Soejima : Ce n'était pas vraiment de l'entraînement, en soi. Je copiais simplement certains mangas parce que j'aimais le style de l'artiste. Il ne s'agissait pas seulement de copier les personnages de l'œuvre, bien que j'essayais d'assimiler le propre du style de l'artiste. Je suppose que c'était la façon qu'avait un enfant de comprendre et d'acquérir un style visuel.
- Le lycée est souvent le moment où les élèves commencent à penser à leur avenir et au parcours qu'ils espèrent suivre. Quels types de projets aviez-vous à l'époque ?
Soejima : À l'école primaire et au collège, mes deux bulletins finaux indiquaient clairement que mon rêve était de devenir mangaka. Cependant une fois arrivé au lycée, j'ai développé une vision plus réaliste du monde et de mes propres compétences. Il ne m'a pas fallu longtemps pour me rendre compte qu'il m'était pratiquement impossible de devenir mangaka professionnel, j'ai alors commencé à envisager d'autres possibilités.

- Au cours de cette période, avez-vous essayé de faire des doujinshi ou de faire le tour des maisons d'édition pour leur montrer votre travail ?
Soejima : Je n'en ai jamais présenté à des maisons d'édition, mais j'avais des amis à qui je montrais souvent mes travaux. J'ai participé à un doujinshi une fois au lycée. Un de mes amis du collège avait commencé à travailler au lieu d'aller au lycée, et il aimait beaucoup les animés et les mangas. Comme il avait un emploi, il était financièrement plus aisé que nous autres lycéens, et c'est lui qui nous a proposé de publier notre propre doujinshi. Il a dit : "Faisons un doujinshi ! Je couvrirai toutes les dépenses, alors vous n'avez qu'à dessiner quelque chose."

- C'est une sacrée opportunité !
Soejima : J'étais très excité à cette idée mais ça a été un échec total. Nous étions des amateurs inconnus, avec peu de compétences, et nous avons soudainement sorti un livre rempli de créations originales. Que pouvions-nous vraiment espérer ? J'ai soumis un manga avec une histoire de fantasy en 16 pages pour ma part, mais j'étais tellement occupé à présenter mon monde épique que je n'ai pas réussi à raconter l'histoire en elle-même. Quiconque connaît un minimum l'industrie du manga sait qu'il ne faut pas faire ça. Nous avons imprimé une centaine d'exemplaires et avons réussi à en vendre... deux.

- Donc, si je devais vous demander quelles sont les connaissances ou les compétences que vous avez acquises grâce à votre expérience avec ce doujinshi, la réponse serait...
Soejima : Absolument aucune.
- Comment et quand avez-vous fait le choix de gagner votre vie en tant qu'illustrateur professionnel ?
Soejima : Je dirais au moment où j'ai postulé pour une école d'art pendant mes examens d'entrée à l'université. Je n'ai pas été accepté, alors j'ai fini par aller dans une académie de design à la place.

- Parlez-nous de votre parcours dans cette académie de design.
Soejima : Je dessinais beaucoup. J'allais aussi à la salle d'arcade de mon quartier presque tous les jours. À l'époque, j'aimais beaucoup "Power Instinct", "Samurai Showdown" et "Street Fighter II".

- Une fois diplômé de l'académie de design, vous êtes devenu un membre à part entière de la société. C'est là qu'Atlus a dû arriver.
Soejima : Pour tout vous dire, j'ai failli rejoindre une agence de publicité juste après avoir obtenu mon diplôme. J'avais été recommandé pour le poste alors que j'étais encore à l'académie, et j'étais convaincu que mon avenir était assuré. Lorsque cette offre a disparu, j'avoue avoir un peu paniqué. Je devais d'un coup me débrouiller tout seul pour trouver un emploi.

- Bien que ce fut dommage pour vous à l'époque, tout le monde doit s'accorder à dire que c'était un coup de chance pour l'industrie du jeu vidéo. Atlus était donc l'une des entreprises auxquelles vous avez postulé dans votre recherche d'emploi ?
Soejima : Atlus faisait partie de mes premiers choix, oui.

- Dans quelles autres entreprises avez-vous postulé à cette période ?
Soejima : Toutes les entreprises auxquelles j'ai postulé faisaient partie de l'industrie du jeu vidéo. J'ai toujours aimé les jeux et leurs personnages quand j'étais enfant, mais je pensais que ça resterait juste un simple loisir. C'est pour ça que j'étais prêt à accepter ce travail à l'agence de publicité. Je pensais qu'un emploi dans la conception de pubs était la carrière la plus réaliste pour quelqu'un comme moi. Je pense que le choc de perdre cet emploi potentiel m'a donné le coup de fouet dont j'avais besoin pour faire de ma passion une carrière. Comme vous le savez, j'ai passé la majeure partie de mes premières années à produire en masse des illustrations conceptuelles et à jouer à des jeux de combat. Il était donc évident pour moi que le métier de mes rêves serait lié à la création de personnages de jeux vidéo.

- À quelles autres entreprises avez-vous postulé en plus d'Atlus ?
Soejima : J'ai postulé à beaucoup d'endroits, la recherche d'emploi est une question de chiffres après tout. Certaines des entreprises pour lesquelles j'ai postulé à l'époque n'existent plus.

- C'était un tournant dans votre vie. Qu'est-ce qui vous a poussé à choisir Atlus plutôt qu'une autre entreprise ?
Soejima : Ils m'ont répondu en premier.

- Avez-vous pensé à chercher un emploi qui n'avait rien à voir avec le dessin ?
Soejima : Comme je dessine depuis mon plus jeune âge, c'est devenu une partie de mon identité. Je n'ai jamais pensé à prendre un travail qui ne me permettrait pas de dessiner.
- Des souvenirs de vos débuts chez Atlus ?
Soejima : Je regardais souvent par-dessus l'épaule de Kaneko pour le voir faire. Le souvenir le plus vif que j'ai de ça concerne une illustration publicitaire qu'il a réalisée et qui était très réussie. Pendant tout le temps où il travaillait dessus je me tenais derrière lui, et il se retournait souvent pour me dire des choses comme : "Qu'est-ce que tu veux ? Va-t'en ! Ouste !". Observer Kaneko était la première fois que je voyais un professionnel en action, alors c'était très important pour moi.

Prenons le temps de revenir sur tous les projets auxquels vous avez participé depuis que vous avez rejoint Atlus.

- PRINT CLUB
(Borne photographique pour salles d'arcade, sortie en 1995)

Soejima : C'est le premier travail que j'ai fait en tant qu'employé d'Atlus, et c'était aussi ma première tentative de création de sprites. J'avais toujours cru que les sprites étaient faciles à faire, et ce n'est qu'après avoir essayé que je me suis rendu compte à quel point cela pouvait être compliqué. Je ne savais même pas tracer un cercle au début, et quand j'ai vu certains de mes aînés en faire les yeux fermés, j'ai compris que je devais demander de l'aide. Je me souviens m'être dit quelque chose comme "Il y a des professionnels pour chaque tâche" et " C'est à ça que ressemble un vrai travail". Le Jack Frost que vous voyez tourner dans l'écran titre de "Print Club" est une animation que j'ai crée. En le revoyant, je constate que ses proportions ne correspondent pas à celles qu'il a dans les jeux.
- SHIN MEGAMI TENSEI : DEVIL SUMMONER
(Sorti en 1995 sur Sega Saturn)

Soejima : Je faisais partie de l'équipe de mise en couleur numérique qui a colorié les démons pour ce jeu. Dès que j'ai rejoint Atlus j'ai voulu participer à ce projet, du coup j'étais ravi d'avoir été choisi. Il avait été décidé dès le départ que les démons seraient en cel-shading, mais Atlus ne possédait pas de tablettes graphiques à l'époque. Colorier à la souris était déjà assez difficile, mais l'un des démons que l'on m'avait confié était Metatron, et cela impliquait beaucoup de surfaces métalliques brillantes. J'ai estimé qu'il serait beaucoup plus facile de donner à Metatron une finition plus photo-réaliste en utilisant l'outil aérographe de Photoshop. J'ai fait un essai qui a vite été validé, et depuis tous les démons sont coloriés avec cet outil.

- MEGAMI IBUNROKU PERSONA
(Sorti en 1996 sur Playstation 1)

Soejima : Je faisais partie de l'équipe de développement de "Devil Summoner" à l'époque mais nous avions fini notre part du travail en avance, du coup j'ai été envoyé pour aider au projet "Megami Ibunroku Persona"(Persona 1). Je me suis occupé d'éditer la vidéo d'introduction et diverses autres cinématiques. J'ai également été autorisé à colorier les illustrations promotionnelles et la boîte du jeu. J'ai aussi dessiné certains personnages, ainsi que donner un coup de main pour les vidéos d'introduction et de conclusion. Je crois qu'on peut dire que j'ai eu un rôle assez important dans ce projet.

Megami Ibunroku Persona
Persona 1
- DEVIL SUMMONER : SOUL HACKERS
(Sorti en 1997 sur Sega Saturn)

Soejima : J'étais chargé des bases artistiques et de la conception des personnages secondaires. Dessiner des personnages a toujours été mon rêve, du coup j'étais très heureux de recevoir cette tâche. J'ai également eu l'occasion de m'impliquer dans l'aspect conceptuel des choses, alors je me suis longuement penché sur les détails mécanique du camion des Spookies. Kaneko était responsable du design des personnages principaux, mais c'est moi qui ai réalisé les portraits de ces personnages dans le jeu. C'était une occasion très spéciale pour moi, car Kaneko m'avait personnellement demandé si je voulais tenter ma chance. Bien sûr, j'ai immédiatement répondu par un "Oui !" plein d'enthousiasme. Mais une fois que je me suis mis au travail, je me suis vite rendu compte de la difficulté de dessiner les personnages de façon à ce qu'ils ressemblent exactement aux illustrations de Kaneko.

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Soul Hackers
- LEGEND OF KARTIA
(Sorti en 1999 sur Playstation 1)

Soejima : Une autre de mes responsabilités dans le projet "Soul Hackers" était les graphismes des objets. C'était le premier titre pour lequel nous avions des représentations visuelles des objets dans le produit final. Jusque là, ça n'avait jamais dépassé les phases de tests. Du coup, on m'a également demandé de m'occuper des objets pour "Legend of Kartia".

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"Rebus" au Japon
- PERSONA 2 : INNOCENT SIN (Sorti en 1999 sur Playstation 1)
- PERSONA 2 : ETERNAL PUNISHMENT (Sorti en 2000 sur Playstation 1)

Soejima : Je me suis occupé de la base artistique et des personnages secondaires, comme je l'avais fait pour "Soul Hackers". En dehors de ça, j'ai pu travailler sur certains décors comme l'extérieur de l'école et d'autres bâtiments. J'ai également participé au concept de la moto du personnage principal.

- SHIN MEGAMI TENSEI I (Sorti en 2001 sur Playstation 1)
- SHIN MEGAMI TENSEI II (Sorti en 2002 sur Playstation 1)
- SHIN MEGAMI TENSEI If... (Sorti en 2002 sur Playstation 1)

Soejima : Ces trois titres n'étaient en fait que des remakes pour la PlayStation, alors la plupart du développement a été sous-traité. Mon rôle consistait à vérifier l'ensemble du travail en tant que représentant d'Atlus, et à m'assurer de la qualité. C'était la première fois que je faisais ce genre de tâche et que je travaillais avec des personnes extérieures à Atlus, donc je dirais que c'était une expérience enrichissante.

- SHIN MEGAMI TENSEI III : NOCTURNE
(Sorti en 2003 sur Playstation 2)

Soejima : Nous sommes passés à des modèles 3D pour les personnages, donc il n'y a pas eu beaucoup de dessin. J'ai travaillé sur une partie de la production des scènes, ainsi que sur les aspects visuels du concept du monde, comme le placement des boss par exemple. J'ai également édité les boucles au niveau programmation. On peut dire que j'ai relevé pas mal de nouveaux défis au cours de ce projet. C'est à cette époque que j'ai commencé à réfléchir un peu plus à mon avenir et à ce que je pouvais apporter.

SMT III Nocturne JP
SMT III Nocturne
- STELLA DEUS
(Sorti en 2004 sur Playstation 2)

Soejima : J'avais entendu des rumeurs selon lesquelles l'équipe qui travaille principalement en collaboration avec des contractants externes était sur le point de commencer le développement d'un nouveau jeu appelé "Stella Deus". Lorsque le directeur du développement est venu dans ma division et m'a demandé si nous avions un illustrateur disponible dans notre équipe, je me suis moi-même proposé pour le poste sans aucune gêne. C'était ma chance d'être responsable du personnage principal et de la direction artistique pour la première fois. Inutile de dire que j'ai vite imaginé toutes sortes d'idées passionnantes. Ce qui m'a posé le plus de problèmes était que je n'avais pas encore défini ce que l'on pouvait considérer comme étant "mon style". Au début j'étais un peu perdu, mais j'ai finalement décidé que la meilleure façon de faire serait de commencer par trouver ce que je pensais être le meilleur équilibre visuel. En revenant au style artistique de l'époque où je dessinais pour le plaisir, j'ai fini par trouver le style que vous voyez aujourd'hui. Mes souvenirs de "Stella Deus" sont donc plus liés au dilemme sur mon style de dessin qu'au processus de conception des personnages.

Stella Deus JP
Stella Deus
- ILLUSTRATIONS : HAISENJYOU NO ARIA
(Illustrations pour le novel Haisenjyou no Aria dans "Faust Vol. 4" sortie en 2004)

Soejima : Dessiner des illustrations pour un novel a un autre attrait que pour un jeu. Une partie de moi a toujours rêvé d'illustrer un novel, et le fait que l'offre vienne d'une publication remarquable comme "Faust" a rendu cette opportunité très intéressante pour moi.

Soeajima pour Haisenjyou no Aria
Illustration Saejima pour Haisenjyou no Arira
- PERSONA 3
(Sorti en 2006 sur Playstation 2)

Soejima : J'ai senti pas mal de pression en travaillant sur "Persona 3". La série avait déjà une base de fans passionnés, et nous voulions être sûrs de ne pas décevoir les joueurs. L'objectif était de faire en sorte que les joueurs de "Megami Tensei" puissent être fiers d'avoir choisi de soutenir la série. C'est avec cet état d'esprit que j'ai dû réévaluer mon travail artistique et la manière dont il s'intégrerait au jeu. J'ai passé beaucoup de temps sur l'interface et la vidéo d'introduction, en espérant que le joueur se dise : "Oui, je joue à un jeu vraiment cool". Étant en charge de la direction artistique ainsi que de la conception des personnages, le succès commercial du jeu reposait en parti sur mes épaules et c'était le point le plus difficile à gérer sur "Persona 3". J'ai dû me heurter à des questions difficiles comme "Que doit faire un designer pour assurer le succès d'un jeu ?". Ce projet m'a vraiment poussé à réfléchir sur la façon dont les éléments visuels d'un jeu affectent son attrait général.

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Persona 3
- PERSONA 3 FES
(Sorti en 2007 sur Playstation 2)

Soejima : J'ai conçu le nouveau personnage, Metis. Nous avons eu la chance de recevoir des réactions positives à "Persona 3", ce qui nous a conduits à développer cet add-on. L'idée d'avoir une nouvelle occasion de dessiner des personnages en faisant plaisir aux joueurs était très gratifiant pour moi en tant que designer.

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Persona 3 FES
- ANOTHER CENTURY’S EPISODE 3 : THE FINAL
(Sorti en 2007 sur Playstation 2)

Soejima : Mon rôle dans ce projet était de concevoir des personnages originaux. J'étais très heureux de recevoir une offre aussi intéressante de la part d'une autre société, et j'ai eu droit à une grande liberté puisque le projet était essentiellement conçu pour fonctionner avec mon propre style. Le vrai défi de ce projet fut de m'assurer que mes dessins ne ressemblaient pas à ce qui avait déjà était fait. "ACE" était rempli de personnages d'anciens animes de méchas, et créer des dessins complétement différent de tous ces personnages déjà existant se révéla être bien plus compliqué que je ne le pensais. Par exemple, lorsque j'ai proposé le concept d'un personnage portant un masque, il m'a été renvoyé avec le commentaire : "Ce dessin ressemble au personnage XX de 00, nous aimerions que vous le changiez". Dans la même veine, lorsque j'ai soumis un personnage portant un uniforme militaire, j'ai reçu le message : "Cet uniforme ressemble trop à l'uniforme de l'armée AA de BB". Rendre mes créations vraiment distinctes du reste fut une épreuve inattendue.

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Another Century Episode 3
- PERSONA : TRINITY SOUL
(Animé sorti en 2008)

Soejima : On m'a confié la tâche de concevoir les bases des personnages pour ce projet. Faire les bases implique de préparer des choses comme les expressions faciales, les costumes et tout ce qui sera référencé lors de la création du concept art. C'était à peu près la même chose que la conception d'un personnage classique, sauf qu'un designer d'animé venait ensuite ajuster mes dessins pour qu'ils correspondent mieux aux autres personnages.

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Persona : Trinity Soul
- PERSONA 4
(Sorti en 2008 sur Playstation 2)

Soejima : Mon rôle était le même que pour "Persona 3" : conception des personnages et direction artistique. Comme "Persona 3 FES" était un add-on de "Persona 3", nous avions déjà une base sur laquelle nous pouvions nous appuyer. Avec "Persona 4" nous avons dû recommencer à zéro et trouver une façon d'insuffler un vent de fraîcheur qui non seulement correspondrait à "Persona 3", mais le surpasserait avec un peu de chance. Nous devions nous assurer que le gameplay de "P4" était une amélioration par rapport à "P3". En plus de ça, nous savions que les joueurs en attendaient plus de la direction artistique et de l'histoire. C'est en ce sens que "P4" nous a confronté à une toute nouvelle série de défis.

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Persona 4
- PERSONA 3 PORTABLE
(Sorti en 2009 sur Playstation Portable)

Soejima : J'ai conçu le personnage principal féminin qui a fait sa première apparition dans "P3P". C'était la première fois que je dessinais un personnage principal féminin, et cela s'est avéré plus difficile que je ne l'aurais imaginé. La série "Persona" a son lot de femmes parmi les fans, et je savais qu'il était important que le personnage principal féminin plaise autant aux joueuses qu'aux joueurs. J'ai passé beaucoup de temps à rassembler des informations pour y parvenir, et je pense que cette expérience a été très enrichissante pour moi.

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Persona 3 Portable
- MOMOIRO TAISEN PAIRON
(Jeu en ligne de Mahjong sorti en 2009)

Soejima : Lorsque j'ai reçu cette proposition, elle n'était accompagnée d'aucune consigne particulière ni d'aucun contexte. La seule chose qu'on m'avait demandé était de dessiner "une fille qui joue au mahjong". De ce fait, j'ai eu une grande liberté pour m'exprimer et j'ai pris beaucoup de plaisir à travailler sur ce projet. Une fois le dessin terminé, on m'a demandé le nom du personnage que j'avais crée. Pour être honnête, je n'y avais même pas pensé. Du coup je me suis empressé d'aller voir un collègue et lui demander de trouver un nom pour le personnage.

Soejima Momoiro Mahjong
Takaoka Mikoto par Soejima
- Vous étiez responsable de la conception des personnages principaux de "Stella Deus", "P3" et "P4". Quelles ont été les principales différences en ce qui concerne le design de ces personnages ?
Soejima : Chaque titre avait son propre concept spécifique, et cela s'est répercuté sur le design des personnages.

- Pouvez-vous nous en dire plus sur ces différences ?
Soejima : Si nous prenons "P3" et "P4" comme exemples, "P3" est plus proche d'un manga fantastique. Il y avait un robot de combat avec Aigis, Mitsuru la présidente du conseil des élèves qui allait à l'école avec une coiffure très chic et des bottes qui lui montaient jusqu'aux genoux. D'un autre côté, "P4" se passait dans une zone rurale, et était assez limité dans l'espace géographique qu'il exploitait. Par conséquent, l'apparence de la ville et le design général des protagonistes étaient plus réalistes. Pour tout titre, le plus important est de s'en tenir au concept central. Nous fixons des limites pour chaque projet, et si nous ne respectons pas ces consignes, l'ensemble de l'œuvre peut avoir l'air déséquilibré.

- Quel était le concept de design derrière "Stella Deus" ?
Soejima : La construction du monde en lui-même était notre priorité pour "Stella Deus". Nous avons d'abord dû déterminer ce qu'était la "fantasy d'après Stella Deus", puis nous avons construit notre concept autour de ça. Nous ne voulions pas que "Stella Deus" soit une simple collection d'éléments vu et revu du genre. Comme ce monde n'était qu'un désert géant, il était important de le remplir d'idées originales qui capteraient l'intérêt des joueurs. La première chose qui me vient à l'esprit quand je pense "fantasy", c'est la traditionnelle armure de métal du héros, mais je crois qu'on sait tous ce qui arriverait à quelqu'un qui essaierait de porter quelque chose comme ça dans un environnement désertique. L'absence intentionnelle d'armure métallique est ainsi devenue notre première règle. Ensuite, nous nous sommes penchés sur le contexte culturel des épées dans le jeu : forgées ou fondues ? En peaufinant ce genre de petits détails, nous avons fini par définir le concept global du monde, ce qui nous a ensuite guidés dans le reste du processus de conception. Bien qu'il s'agisse de "fantasy", le réalisme offert par un monde imaginaire est ce qui le rend vraiment attirant.

- Avez-vous abordé le processus de dessin proprement dit avec une approche différente pour chacune de ces trois œuvres ?
Soejima : Etant donné qu'il s'agissait d'un jeu de fantasy, je voulais donner à la direction artistique de "Stella Deus" une certaine profondeur et saveur particulière, alors j'ai surtout utilisé des pinceaux. J'ai commencé "P3" avec des pinceaux aussi mais je n'étais pas satisfait du résultat, alors je suis passé au cel shading en cours de route. "P4" a été fait en cel shading du début à la fin.

- Les différences entre "P3" et "P4" sont assez intéressantes...
Soejima : J'ai intentionnellement changé la façon d'intégrer les couleurs pour éviter que le jeu ait un aspect "animé" trop prononcé dans "P4". Il y a beaucoup de fans d'animés qui seraient prêts à accepter une touche de ce style dans leurs jeux, mais il y aussi une partie des joueurs qui refuseront de s'intéresser à un titre juste parce qu'il a un style "animé". Pour aller encore plus loin, certains de ces joueurs "anti-anime" sont "pro-manga", donc en passant à un style légèrement "manga", j'ai réussi à trouver un compromis qui ne déplairait à aucun groupe de joueurs particulier quelque soit leur âge ou leur sexe. Je n'ai pas réfléchi à la différence entre "animé" et "manga" pour "P3", mais j'ai passé plus de temps à réfléchir à cette philosophie pour "P4".

- Pourriez-vous expliquer la différence entre le style animé et manga ?
Soejima : Le cel shading est associé aux animés en général et certaines ombres sont colorées avec. On peut dire qu'il y a deux types "d'ombres". Pour les besoins de mon exemple, je vais les appeler "nuance" et "ombre". Une "ombre" est la zone sombre projetée sur une surface par la présence d'un autre objet. Si vous avez un poteau flottant en l'air, il y aura une "ombre" sur le sol en dessous. Dans le même genre, vous pouvez voir une "ombre" sur le front d'une personne, projetée par sa frange. Une "nuance" est la zone légèrement plus sombre d'un objet qui contribue à le faire paraître tridimensionnel. Sur le poteau que j'ai mentionné plus tôt, j'ajouterais des "nuances" qui semblent suivre la courbe du poteau afin de le faire paraître rond. La "nuance" est ce qui donne à une image l'aspect qui est généralement associé aux animes. Du coup avec "P4" j'ai volontairement évité d'ajouter des "nuances", et je n'ai ajouté des "ombres" que lorsque c'était nécessaire. Mais... en examinant le résultat de mon travail maintenant, je vois que j'ai ignoré de façon flagrante ma propre règle plusieurs fois.

- Un portrait exclusif d'Aigis orne la couverture de ce livre, et c'est aussi la plus récente œuvre contenue dans ses pages. Avec cette illustration comme exemple, explorons les techniques et le processus de réflexion que vous appliquez à vos dessins. Commencez par nous dire pourquoi vous avez choisi Aigis pour la couverture.
Soejima : J'ai choisi Aigis pour la couverture en me disant qu'elle permettrait au public de tout de suite comprendre de qui vient cet artbook. De tous les personnages que j'ai dessinés, je crois qu'on peut affirmer qu'Aigis est le personnage le plus connu et le plus facilement reconnaissable. Je suppose que j'aurais pu utiliser le protagoniste de "P3" ou "P4", mais Aigis a toujours été un personnage unique à mes yeux, surtout en ce qui concerne la complexité de son design. Aigis est associée à des souvenirs marquants, j'ai eu beaucoup de mal à dessiner un robot avec mon style.

- Que voulez-vous dire exactement par "la complexité de son design" ?
Soejima : Je suppose que je veux dire toute l'imagination qui compose son design. Pour des personnages comme Yukiko de "P4", il y a une certaine dose de réalisme imposé. Ainsi les questions entourant le design de Yukiko étaient des choses comme "Est-ce qu'on devrait lui mettre un bandeau ?" ou "Peut-être qu'un cardigan lui irait mieux ?" ou "Comment devrait-on définir sa silhouette ?". En raison des restrictions avec la direction générale des jeux dans la série, Aigis était sans doute le personnage que j'ai conçu avec la plus grande liberté d'imagination.

- Quel était le thème de cette illustration ?
Soejima : Je pense que j'essayais de montrer à quoi ressemblerait un personnage de "P3" si je le dessinais à 100% dans mon style personnel. J'ai toujours préféré l'aspect que les pinceaux donnent à une œuvre, donc je pense que l'art de "Stella Deus" est le meilleur exemple de "mon style". Cela ne se résume pas qu'à mon degré de satisfaction devant le résultat final. Dessiner au pinceau me procure un vrai plaisir, chaque coup de pinceau me donne l'impression de déterrer lentement quelque chose. Une méthode qui correspond ainsi à ma personnalité est ce que je considère comme étant "mon style".

- Le résultat est magnifique !
Soejima : Merci beaucoup. Pour tout vous dire, j'ai commencé à dessiner cette illustration avant même qu'il ne soit question de sortir ce livre. Je travaillais dessus juste pour le plaisir, je ne m'attendais pas à ce qu'elle soit publiée.

Qu'est-ce qui vous a inspiré à dessiner cette illustration ?
Soejima : De par la nature de mon travail, le temps et l'effort que je peux consacrer à une seule illustration est toujours limitée. Lorsque j'ai commencé cette œuvre, elle était censée être cette illustration que je "ne finirais jamais". J'avais prévu de continuer à la modifier sans fin, selon mon humeur du moment. Chaque fois que je travaillais dessus, j'y consacrais toutes les compétences que j'avais acquises jusque-là, toujours enthousiaste à l'idée de faire des petits ajustements, et sans jamais avoir l'impression de manquer de temps pour finir. Lorsqu'on m'a sollicité pour ce livre, j'ai dû choisir entre dessiner une toute nouvelle œuvre en partant de rien, ou terminer cette création pour en faire la couverture. Ce n'était pas un choix facile à faire, mais je savais au plus profond de moi que ce portrait d'Aigis était la meilleure représentation de l'âme de ce livre d'art.

- Quand avez-vous commencé à dessiner cette illustration ?
Soejima : J'ai commencé début 2010. Mais ce n'est pas comme si je travaillais dessus en permanence. À un moment, je me suis retrouvé à court de jus après avoir dessiné les cheveux, et elle est restée à prendre la poussière dans un coin pendant un moment...

- Vous venez de mentionner les cheveux en particulier... était-ce une partie particulièrement importante de cette création ?
Soejima : En effet, le niveau de détail des cheveux et des pièces mécaniques était quelque chose que je voulais mettre en avant dans ce dessin. Toutes les illustrations d'Aigis que j'ai faites jusqu'à présent ont dû être modifiées pour mieux s'adapter à l'animé. En supprimant toutes ces contraintes externes, j'ai pu dessiner Aigis comme je le voulais, avec autant de détails que possible. Cette illustration représente la plus fidèle image d'Aigis telle que je l'avais imaginée à la base. Les détails rendus possibles par ce niveau de liberté sont la façon dont les cheveux ressortent, leur couleur qui est une nuance d'or unique, le teint de la peau, et la qualité de chaque partie distincte. De plus, comme cette illustration était destinée à mon livre d'art personnel, j'ai pu ignorer les détails "officiels" des personnages. J'espère que les lecteurs trouveront ces petites différences intéressantes, comme par exemple la structure de l'épaule et la mitraillette.

- Vous êtes à la fois illustrateur et designer de personnages. Avez-vous une certaine philosophie que vous suivez concernant ces deux activités proches mais bien distinctes ?
Soejima : En ce qui concerne le design des personnages... J'essaie de créer des personnages faciles à comprendre. J'ai par exemple mis Chie de "P4" en jogging, parce que c'est un stéréotype répandu des étudiants de zone rurale. Mais j'ai aussi donné au jogging habituellement fade un aspect plus tendance en utilisant des couleurs vives, afin de le faire correspondre à l'ambiance moderne du jeu et de le rendre plus mémorable. On peut dire qu'un design parfait de personnage pour moi consiste à prendre des concepts que tout le monde comprend, et les mélanger pour en faire quelque de nouveau et original.

- Pourquoi est-il si important pour vous que le design de vos personnages soit facile à comprendre ?
Soejima : Je suppose que je veux créer une forme de sympathie ou de connexion avec les personnes qui regardent mes dessins. Je veux que le public soit capable de "cerner " le personnage au premier coup d'œil, et comprenne ce que j'ai essayé de transmettre avec mon dessin.

- Tous les personnages que vous avez conçus semblent dégager une sorte de pureté, d'élégance... Était-ce intentionnel ?
Soejima : Je suppose que c'est le cas. Je pense que mes préférences et mes opinions personnelles sont liées à ça. Lorsque je conçois un personnage, je fais attention à ne pas le rendre vulgaire. Ce n'est pas que j'ai quoi que ce soit contre la vulgarité, j'ose même dire que j'aime ça si c'est bien dosé, mais je veux tout simplement que mes personnages transmettent une sensation réconfortante. J'ai envie de m'essayer à des projets de nature différente, et j'aimerais bien sortir quelque chose où le consommateur se dirait : "Il a le droit de dessiner quelque chose comme ça avec son style !?". Malgré le fait que j'insuffle ce sentiment de réconfort dans la conception de mes personnages, je tiens à ce que mon style général reste très flexible. Rien ne me ferait plus plaisir que de voir nos projets appréciés par un public plus large, sans tenir compte de l'âge ou du sexe... bien que je comprenne qu'il puisse être difficile pour nous de plaire à des personnes âgées. Une autre chose qui me semble très importante est la notion de concevoir des personnages qui seront appréciés par des joueurs du même sexe. Même dans la vraie vie, je pense que les personnes appréciées par les membres du même sexe ont un charme inné qui les rend plus attirants pour les membres du sexe opposé. Ainsi, en suivant cette théorie, si je parviens à créer un personnage qui plaît aux joueurs du même sexe, il est presque garanti qu'il sera apprécié par tous les joueurs, quel que soit leur sexe.

- Avez-vous une philosophie similaire en tant qu'illustrateur ?
Soejima : En tant qu'illustrateur, j'ai tendance à me concentrer sur l'ambiance. J'utilise l'arrière-plan pour créer une certaine ambiance, qu'elle soit sombre, amusante, ou autre. En revanche, si le but d'une illustration est de mettre en valeur un design, alors le design lui-même portera l'ambiance que j'essaie de transmettre, il devient ainsi moins important d'avoir un arrière-plan bien défini. En dehors de ça, je prends également en compte l'utilisation finale de l'illustration et le rôle qu'elle est censée jouer.

- Pour conclure cette interview, parlez-nous de vos projets pour l'avenir. Avez-vous des objectifs ou des envies particulières en matière de jeux ?
Soejima : J'adore tout ce qui touche à l'armée et la science-fiction, alors j'adorerais avoir l'occasion de concevoir un monde de A à Z pour un jeu avec ces thématiques.

- En voilà un projet qui ne demande qu'à devenir réalité ! Autre chose ?
Soejima : Ma lubie du moment se porte sur le concept de vaisseau de guerre spatial... Je ressens un besoin inexplicable d'en dessiner un. Attendez... oubliez ce que je viens de dire. C'est sûrement juste une envie passagère qui disparaîtra d'ici quelques semaines.

- Nous serions très intéressés de voir votre version d'un vaisseau de guerre spatial. Avez-vous des projets en dehors de l'industrie du jeu ?
Soejima : J'ai un profond désir de créer mon propre manga, mais je n'ai jamais fini quoi que ce soit qui puisse être considéré, même vaguement, comme un manga. Je ne suis sans doute pas fait pour ce genre de projet, mais je pense que cela pourrait être une expérience enrichissante si j'allais jusqu'au bout. Je crois que je veux dessiner un manga parce que j'y vois un défi ainsi qu'un moyen d'assouvir ma curiosité sur l'ensemble du processus. Le manga est comme une forme d'art hybride que vous pouvez façonner à votre guise. Qu'est-ce que cela fait de réaliser toutes les étapes du processus de création soi-même ? Serais-je un jour capable de faire tout ça ? Si je veux connaître les réponses à ces questions, il me faudra essayer.

- S'agirait-il d'une création entièrement originale, ou utiliseriez-vous des personnages que vous avez déjà créés ?
Soejima : J'aurais l'impression de tricher si j'utilisais des personnages déjà existants, alors j'opterais clairement pour quelque chose de complétement nouveau. Le manga aurait aussi 36 pages. Entièrement colorées.

- On dirait que vous avez déjà tout prévu. Les fans de votre travail peuvent-ils en déduire que ce projet est déjà en cours ?
Soejima : J'ai un cahier intitulé "36 pages en couleur", mais il est toujours vierge pour l'instant. Je sais que ça a l'air d'être une blague, mais je suis très sérieux. Dessiner un manga est quelque chose que j'aimerais faire... un jour... peut-être bientôt.

- Merci d'avoir pris le temps de nous parler. Vos commentaires étaient à la fois instructifs et divertissants. Nous avons hâte de voir votre manga terminé, et nous sommes sûrs que nous reviendrons pour une autre interview lorsque votre prochain livre d'art sera publié.


Juin 2010, locaux d'Atlus.
Traduction de l'Interview terminée le 21/11/2021.
Publié le 21/11/2021.
Traduction et rédaction par Mihael.
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